Le Montpellier Handball est à soixante minutes de décrocher un trophée dans la saison de ses 40 ans et enfin rouvrir l’armoire bien garni du club. Cette finale de la coupe de France samedi (20h30 à l’Accor Arena de Paris) face à Nantes ne manque évidemment pas d’enjeux pour les Montpelliérains. Mais dans quel état abordent-ils cette rencontre ? Au terme d’une longue saison, ce dernier match avant les vacances apparait comme un ultime col à franchir dans une ascension éprouvante. Patrice Canayer et Valentin Porte espèrent qu’il reste encore un peu d’énergie dans le moteur.
Mardi soir avec la victoire face à Chambéry scellant sa deuxième place, Montpellier a rempli son objectif de la saison, à savoir retrouver la Ligue des champions. Une grande satisfaction qu’appelle à apprécier à sa juste valeur Patrice Canayer. « Dans un championnat de très grande qualité, c’est devenu extrêmement difficile de se qualifier. De la préparation jusqu’à quasiment le dernier ballon du dernier match, tu mesures toute la somme d’efforts qu’il a fallu consentir ».
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Dans ce « combat extrêmement loyal avec Nantes où toutes les équipes ont joué le jeu », le manager montpelliérain y voit « la juste récompense du travail fourni » en reconnaissant que son adversaire « aurait pu dire la même chose » et en étant toujours lucide que « tout l’objectif d’une saison tient à peu de choses ». Un arrêt, une possession, un but… qui amène à devancer les Nantais de deux points. Soit le même écart qu’avec les Parisiens, champions de France.
D’autant que le manager a sorti les anciens classements et la calculatrice pour analyser la performance de son équipe au regard des saisons passées. « J’ai regardé ce que donnait 52 points en championnat et je me suis rendu compte que cela représente une des plus belles performances depuis les dix dernières années » pointe-t-il.
« Il faut que l’on remonte en pression », reconnaissait jeudi Patrice Canayer, « Il y a 15 jours nous étions où nous voulions être, dans la situation du sprint final où tous les matchs sont importants. C’est formidable mais tu dépenses une énergie énorme mentalement et physiquement ».
Après être passé à côté du Final 4 de la Ligue Européenne, les joueurs ont su rebondir en championnat en remportant les deux derniers confrontations à domicile. « Ce ne sont pas des matchs simples face à des joueurs de qualité qui n’ont plus grande chose à jouer en fin de saison. Cela a été difficile. C’est logique que l’on ait maintenant un temps de soulagement par rapport au championnat » expliquait-il. Jeudi après-midi, une partie du staff et des joueurs ont gagné la capitale pour participer à la soirée des Trophées de la Ligue – durant laquelle Charles Bolzinger a été désigné meilleur espoir – avant d’être rejoint par l’ensemble du groupe vendredi.
Samedi, Montpellier et Nantes se retrouveront donc une nouvelle fois. Deux clubs qui présentent de nombreuses similitudes dans leur fonctionnement et leur développement. À la différence notable que Nantes a réalisé rapidement sa nouvelle salle et en tire depuis tous les bénéfices dans sa croissance sportive. Et encore cette année, le H a pris le dessus. « On a battu deux fois le PSG cette saison, pas beaucoup d’équipes peuvent s’en targuer. On a pris tous les points contre Chambéry et Nîmes. C’est vrai, on est en déficit de victoire contre Nantes » défend Patrice Canayer.
Un déficit de victoire qui va bien au-delà de la saison puisque le dernier succès remonte au 27 mai 2018 en finale de Ligue des Champions. Sans jamais être très loin, à l’instar des deux confrontations en championnat perdues d’un but (29-30 et 29-28), Patrice Canayer n’a pas d’explication particulière. « Je ne pense pas que ce soit un problème de style de jeu ou un problème tactique. On a souvent été en échec sur des fins de match » avance-t-il.
Nantes serait-il devenu la bête noire de Montpellier ? « Pendant des années nous avons été la bête noire de certaines équipes. Cela peut arriver. C’est aux équipes de faire en sorte que ce concept n’est plus lieu. En gros, il faut tuer la bête à un moment donné » explique Patrice Canayer qui renvoie au terrain : « Je ne suis pas dans la tête des joueurs. Il faudrait leur poser la question. Personnellement, je n’ai pas d’angoisse particulière avant d’affronter Nantes ».
« On me voit comme quelqu’un qui a tout gagné. Avec les Bleus c’est vrai, parfois même en plusieurs exemplaires mais en France je n’ai absolument rien gagné. Pas une coupe de France, un championnat ou une coupe de la Ligue ». S’il y a bien eu la Ligue des Champions et le Trophée des Champions ponctuant une saison 2017-2018 exceptionnelle un an après son arrivée dans l’Hérault, Valentin Porte en a marre de ne pas encore avoir soulevé un des trois trophées nationaux en tant que capitaine du Montpellier Handball. Cette finale face à Nantes est donc une opportunité à saisir.
Comment se sent l’équipe avant cette finale ? Plutôt apaisée. La grosse pression était surtout sur ce match de Chambéry. L’objectif numéro un du club était de se qualifier pour la Ligue des Champions. Se retrouver à jouer une heure, sur le dernier match du championnat, pour valider cet objectif et ce billet, c’est toujours un peu stressant. Cela s’est vu mais le contrat est rempli donc aujourd’hui, dans la tête, on est plus serein et plus apaisé. C’est la meilleure sensation avant d’entamer la préparation d’un tel match.
En tant que capitaine, sur quels points vas-tu motiver tes coéquipiers ? C’est dur de motiver mes coéquipiers sur un dernier match de la saison quand elle a été aussi longue. C’est dur. C’est dur parce que les organismes ont beaucoup souffert et souffrent encore. On est à une heure des vacances mais c’est quand même une heure pour un titre. Franchement, dans ce genre de match il n’y a pas grand chose à dire car tout le monde est motivé. Mais la motivation, c’était ce dernier match contre Chambéry où il fallait vraiment prendre conscience qu’il était capital. Maintenant, avec l’esprit un peu plus léger, cette finale qui se présente à nous, c’est un peu la cerise sur le gâteau. La saison est réussie, à nous de la rendre plus belle avec un titre qui nous échappe depuis la saison 2015-2016. Cela commence à faire longtemps.
Comment l’équipe doit-elle aborder cette finale ? Il faut surtout prendre en compte que cela va ressembler au Final 4 de coupe d’Europe dans le sens où on est une équipe qui n’a pas l’habitude de ce genre de rendez-vous. Des joueurs vont découvrir l’Accor Arena par exemple, ce sont des choses à prendre en compte. Après, c’est un autre état d’esprit que le Final 4 où peut-être nous n’étions pas au niveau. Là, avec la qualification en Ligue des champions et le dernier match de l’année, tout est réuni pour que l’on se mette le moins de pression possible afin de profiter de ce moment. Normalement, quand on joue sans pression, c’est là où on est les meilleurs. Mais on n’est pas tout seul sur le terrain, nous sommes face à une équipe qui tourne très bien et nous domine depuis pas mal d’années maintenant. Et ils auront d’autres motivations pour gagner ce match. On verra ce que cela donne.
Comment expliques-tu ces difficultés face à Nantes ? Des équipes ont des bêtes noires, d’autres non. Je discutais avec des amis toulousains, eux ne gagnent pas contre Chambéry. On a tous des équipes qui nous réussissent moins. Nantes est une équipe qui progresse chaque année et qui a aujourd’hui un très bel effectif. Ils nous ressemblent et c’est peut-être ça qui nous gêne un petit peu. Quand je les vois jouer, j’ai l’impression de nous voir un peu. C’est une équipe avec plusieurs plans tactiques, avec des joueurs différents sur le même poste, qui aime bien jouer au handball en allant vite. Peut-être que ces dernières années, ils avaient une profondeur de banc qui impactait plus, ce qui faisait que nous n’étions jamais loin mais on est quand même dominé depuis quelques années. Ils sont sur une belle série, on sait tous qu’elle ne peut pas continuer indéfiniment. Samedi, ce serait le bon moment pour l’arrêter.
L’entraîneur dit d’ailleurs ne pas avoir de préparation spécifique. « De plus en plus, je me préoccupe de mon équipe et pas des équipes adverses. Le sens de mon travail aujourd’hui est de comment mettre les joueurs dans les meilleures conditions pour performer samedi. En plus, Nantes, je sais comment ils jouent, je n’ai même pas besoin de voir la vidéo. Je connais leurs points faibles et leurs points forts. Et eux aussi, on se connait par coeur. cela ne sert à rien de se polariser sur eux » défend-il.
Le manager montpelliérain bluffe-t-il quant à l’état de forme de ses joueurs ? Sans doute pas. « Je trouve que l’on n’est pas au top de notre jeu mais on est très combatif. Nous avons des faiblesses mais cette équipe a envie d’avancer et d’apprendre de ses erreurs. Il y a une vraie volonté collective loue-t-il cependant. Avec des joueurs à l’infirmerie comme Diego Simonet ou des manques dans certains compartiments du jeu tels les tirs de loin, Patrice Canayer ne se cache pas. « Je ne vais pas changer en trois jours notre manière de jouer. Notre équipe a ses forces et ses faiblesses mais elle est bien en place ».
Seule surprise potentielle avec un retour d’Hugo Descat pour un dernier match sous les couleurs montpelliéraines mais le manager coupe court. « Lui pense parce que c’est Hugo Descat, parce que même avec deux jambes dans le plâtre, qu’il peut amener quelque chose. Moi, je considère qu’il n’apporte pas assez de garanties ». L’annonçant encore trop juste après trois mois et demi d’absence, l’ailier gauche voit aujourd’hui Lucas Pellas, le titulaire au poste, et Jaime Fernandez, pour son apport en défense, lui barrer la route.
Alors qui est favori dans cette finale ? « Sur les derniers matchs, c’est Nantes. Si on prend la position en championnat, c’est nous en étant deux points devant eux. Mais l’élément factuel qui me semble le plus important, c’est dans quel état seront les deux équipes sur ce dernier match » répond Patrice Canayer qui poursuit : « Quand tu arrives en fin de course, les chevaux ont envie de rentrer à l’écurie. Alors quelle équipe a encore suffisamment de ressource et l’énergie nécessaire pour arriver à se dépasser ? Car pour remporter, cette finale de coupe, il faudra se dépasser et compter également sur la maîtrise ».
À l’heure d’aborder sa 31e finale, pour 25 remporter dont 13 coupe de France, à la tête du MHB, Patrice Canayer résume la problématique de celle-ci : « On a beaucoup donné ces dernières semaines, est-ce qu’il nous reste encore un peu d’essence dans le moteur ? Vous le verrez. Mais quoi qu’il se passe, on ne pourra pas reprocher à cette équipe de s’être battue pendant neuf mois ».