Chronique judiciaire : « Il a uriné dans la voiture de police »


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Tribunal correctionnel de Montpellier, audience des comparutions immédiates, lundi 1er avril. Mourad, 35 ans, un père de famille sans emploi qui perçoit le RSA se retrouve dans le box pour la énième fois, pour des délits routiers, sur fond d’alcoolisation.

Mourad sort d’un week-end de garde à vue. Samedi 30 mars, à 21h15, une patrouille de police de la Sécurité publique remarque une voiture anormalement immobilisée sur les rails du tramway, rue de Malbosc, dans le quartier éponyme, avec le conducteur à bord. Contrôlé, il sent l’alcool, tient un discours incohérent et sur un siège arrière, détient du cannabis dans deux petites boîtes avec 38 grammes d’herbe et 10 grammes de résine.

En garde à vue, il révèle aux policiers qui l’auditionnent avoir été malmené, puis frappé à la tête et giflé par leurs collègues qui ont procédé à son interpellation. En arrivant au commissariat central, ils ont découvert que Mourad avait uriné dans la voiture de police et n’auraient guère apprécié.

Violences non actées

Lors du procès, son avocat, Paul David s’étonne que ces accusations de violences n’ont pas été actées dans la procédure judiciaire…D’autant qu’il relève que son client a été coopératif de bout en bout, il a reconnu avoir conduit en état d’ivresse après un apéritif musclé chez un ami à Grabels, où il a mélangé whisky et bières et il n’a pas dissimulé les boîtes remplies de cannabis.

Problème : Mourad est en état de récidive légale pour avoir été condamné par ce même tribunal en août 2015 pour des faits identiques. Sur son casier judiciaire, figurent de nombreuses condamnations similaires. « C’est l’erreur de ma vie, je vous en supplie, aidez-moi à me soigner, envoyez moi dans un hôpital », lâche Mourad, debout dans le box entre deux gendarmes de l’escorte.

« Vous tenez toujours le même discours »

La présidente, Geneviève Boussaguet s’emporte : « Vous avez bénéficié de six condamnations avec sursis et mise à l’épreuve ces trois dernières années, on vous a fait confiance six fois et chaque fois, votre discours, c’est que vous faites l’erreur de votre vie. Vous avez eu six sursis, pas un, six. Et vous venez encore demander notre aide pour soigner vos addictions ».

La procureure stagiaire se lève et brandit le casier judiciaire du prévenu : « À vous écouter, c’est la septième erreur de votre vie. Regardez, seize mentions figurent dessus pour des conduites en état d’ivresse et des détentions de stupéfiants. Vous aviez 1,10 gramme d’alcool par litre de sang et du cannabis pour 240€, vous dites que vous l’avez payé 100€, on ne peut pas vérifier. Cela dit, je veux bien, mais, que ce soit pour votre consommation personnelle, j’en doute. Plus grave, vous amputez donc votre RSA. Quelle part consacrez vous chaque mois pour vos 4 enfants de 3 ans, 10, 11,5 et 15 ans ? Et puis, vous n’avez jamais tenu compte des précédentes mises en garde qui ont été adressées ici. Il faut marquer un coup d’arrêt ». Elle veut un an de prison ferme et mandat de dépôt.

« Il est capable de comprendre les messages »

En défense, Paul David n’est pas du tout d’accord avec la vision du ministère public et trouve sévère la peine requise : « Il est faux d’affirmer qu’il n’a pas tenu compte des précédents avertissements sous la forme des sursis avec mises à l’épreuve, au contraire, notamment quand il a repassé et obtenu son permis de conduire, après son annulation par votre juridiction lors de sa condamnation en 2015 ».

L’avocat évoque le prix « cassé » de l’achat de la résine et de l’herbe de cannabis : « Personne ne le croit, quand il affirme avoir acheté le haschich à un dealer 100€, au lieu des 240€, mais, il faut savoir qu’il y a du bon et du mauvais shit et que donc les tarifs ne sont pas toujours identiques selon la qualité ».

« Il élève ses quatre enfants »

Maître Paul David insiste sur le profil de Mourad : « Comme il est au chômage, il élève ses quatre enfants, pendant que leur mère, sa concubine, est absente, puisqu’elle travaille. Ils vont se retrouver bien seuls sans leur papa ». Il est le dernier à avoir la parole, avant le délibéré : « Ma place n’est pas à Villeneuve-lès-Maguelone, mais dans un hôpital spécialisé pour que me sorte de cette spirale infernale ».

Les juges ont suivi les réquisitions du parquet : Mourad écope d’un an de prison ferme avec mandat de dépôt et l’annulation de son permis de conduire avec interdiction de le repasser avant trois mois.

Le 09/04/2019 à 12:30, par Jean-Marc Aubert.