Montpellier : quel est le sort des 165 Roms qui viennent de quitter le village de transition ?


Le préfet et le maire de Montpellier ont fermé le portail; d'accès au village de transition
Le préfet et le maire de Montpellier ont fermé le portail; d’accès au village de transition (©JMA / Métropolitain)

C’est désormais un village fantôme : les 165 Roms ont quitté ces derniers jours par vagues successives le village de transition installé en avril 2022 entre les installations sportives de la Rauze, aux portes sud de Montpellier et le site de la Céreirède, dans la commune mitoyenne de Lattes. Et ce mercredi 24 avril 2024, à 10h30, le préfet de l’Hérault et le maire de Montpellier (président de la Métropole) ont fermé et cadenassé le portail d’accès. Pour quelques jours encore, seul un agent de sécurité veille sur la centaine de modulaires, vides.

Le départ étalé des Roms, deux ans jour pour jour après leur arrivée, s’est déroulé sans incident, même si mardi soir, une famille a fait de la résistance en refusant de quitter les lieux. Tout est rapidement rentré dans l’ordre. « Engagement tenu », pour François-Xavier Lauch, « Parole tenue » a répondu en écho Michaël Delafosse, ceint de son écharpe tricolore : c’est même une double promesse qui s’est réalisée, celle du démantèlement de cette verrue qu’était le bidonville sur les hauteurs de Celleneuve, secteur du Pilory, « le plus grand de France par le nombre de Roms, plus de 600 et le plus infâme au niveau du respect de la dignité humaine » et celle de ce village de transition, avec un bilan positif et encourageant.

« Un dispositif unique »

Sur place ce mercredi matin, entouré outre de Michaël Delafosse, de responsables de la Ddets (emploi, travail et solidarités), le service de la préfecture en charge du dossier, du maire de Lattes, Cyril Meunier, d’élus et des présidents des associations engagées dans cette action, François-Xavier Lauch a confirmé : « Ce dispositif unique a permis l’évacuation du bidonville de Celleneuve en proposant une solution de logement et d’emploi aux ménages vivant sur le site, parfois depuis des dizaines d’années. Cet engagement tenu de l’Etat envoie un signal fort pour l’insertion sociale et économique des populations roms. 165 personnes avaient été accueillies dans ce village, sur le principe du « logement d’abord », offrir un habitat stable et décent afin de faciliter l’accès à la scolarisation, à l’emploi et surtout au logement pour permettre une sortie dans les deux ans. C’est dans ce but que l’Etat a mis en place et financé cet équipement sur un terrain mis à disposition et aménagé par la ville de Montpellier et a mandaté deux associations, Coallia et 2ChosesLune, en charge de l’hébergement et de l’accompagnement des résidents ».

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Le préfet a rappellé que, « l’action de l’Etat a reposé sur une coordination des acteurs institutionnels et associatifs pour assurer l’intégration du village dans le quartier, avec la tenue régulière d’un comité de voisinage, faciliter l’accès à l’emploi avec France Travail, Cap Emploi et la Mission locale, garantir une scolarisation dans les établissements les plus proches et accompagner vers le logement ». 

Le site du Pilory à Celleneuve à l’horizon 2027

Michaël Delafosse a fait le point sur le devenir de l »ancien site du bidonville de Celleneuve, à Pilory « qui va progressivement devenir un des cœurs battants du quartier des Cévennes. C’est sur ce site emblématique de la ville que se déroule actuellement le « 7ème Permis d’imaginer », en partenariat avec le Centre des Arts du Cirque Balthazar et Altemed, jusqu’à fin septembre 2024″.

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Le maire rappelle que, « d »ici 2027, un futur espace public central sera créé pour le quartier, avec l’implantation de trois équipements phares : un hôtel des protections des populations regroupant de nombreuses unité chargées de la sécurité et un groupe scolaire, autour d’un parc paysager de plus de 3 000m², qui participeront à la vie de quartier et à la qualité de vie sur le territoire métropolitain ».

31 ménages en logement adapté

Ce mercredi, le préfet a livré le bilan de cette opération « avec des résultats qui sont au rendez-vous : 105 des résidents, soit 31 ménages sortent en logement adapté accompagné par des associations mandatées par l’Etat : Adages, Aers, La Clairière et Gestare, les bailleurs sociaux se sont engagés en attribuant des logements, ACM Habitat a été à ce titre exemplaire dans sa détermination à soutenir cette démarche. 8 personnes ont été prises en charge par le SIAO 115 en hébergement d’urgence ou par le Conseil départemental en raison d’une situation sociale trop fragile ou trop instable. 31 personnes ont décidé de retourner vivre en Roumanie et 17 personnes sont sorties du dispositif, 8 au titre d’une exclusion pour avoir multiplié des manquements, 6 sont hébergées par des tiers, 2 sont incarcérées et une personne est sortie volontairement du dispositif.

Autour du préfet et du maire, des élus, dont le député Philippe Sorez du Groupe Renaissance.
Autour du préfet et du maire, des élus, dont le député Philippe Sorez du Groupe Renaissance. (©JMA / Métropolitain)

Sur les 45 personnes accompagnées dans leur recherche d’emploi, 16 ont accédé à un CDI, 16 ont trouvé un CDD et 3 ont créé leur micro-entreprise. 10 personnes sont encore en recherche d’emploi et font l’objet d’un suivi particulier. Les enfants de 3 à 16 ans ont suivi une scolarisation avec un taux de présence de 80% à la rentrée scolaire 2023-2024. À la fermeture du site, tous les ménages se sont vu proposer une solution adaptée à leur situation sociale et professionnelle.

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« L’Etat et l’ensemble de ses partenaires institutionnels et associatifs peuvent donc se féliciter d’un opération prometteuse basée sur une amélioration complète des conditions de vie des familles ouvrant la voie à un accès à la scolarisation, à l’emploi et au logement, profitable in fine à l’ensemble de la population locale », a dit le préfet, qui n’a pas caché que, « au regard de ce résultat positif, je suis prêt à travailler avec la Ville et les associations, afin de poursuivre la démarche de résorption des bidonvilles à Montpellier ».

« J’ai agi dès mon élection »

Cette proposition n’est pas tombée dans l’oreille d’un sourd, comme a apprécié Michaël Delafosse, qui a dénoncé en revanche le rôle d’un ou deux préfets et des élus du précédent mandat sourds, mais en plus aveugles : « Dans l’indifférence générale, un nourrisson et un homme âgé sont morts dans le bidonville de Celleneuve infesté de rats et autres espèces nuisibles vecteurs de maladies. Non seulement, ces préfets et ces élus ne faisaient rien, mais ils répétaient en boucle des y’a qu’à faire, autour de la table, lors de réunions. Dès mon élection, j’ai agi, j’ai tiré un trait sur ce triste héritage en mettant en oeuvre une stratégie et une méthode pour faire fermer les bidonvilles et les squats qui ne correspondent pas à la norme acceptable à Montpellier et dans la Métropole, avec au bout des relogements », se souvenant également que « à notre arrivée à la mairie, nous avons été obligés de gérer le sort de 346 mineurs isolés disséminés dans des hôtels, avec une insécurité permanente en centre-ville à l’époque : tout cela est terminé ».

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Le maire a expliqué que, « pour les relogements, des critères d’attribution ont été retenus via le système des baux glissants ». Michaël Delafosse n’est pas peu fier d’avoir gagné le pari du village de transition, un projet qui il y a deux ans, avait soulevé des tempêtes d’opposants : des riverains montpelliérains et lattois, d’associations, d’élus, y compris jusque dans les séances du conseil métropolitain et de révéler que, « des préfets et des élus de villes du territoire nous sollicitent pour analyser comment la Ville de Montpellier a géré ce dossier. Des maires se sont même déjà déplacés ». 

Le préfet et le maire, président de la Métropole viennent de cadenasser le portail
Le préfet et le maire, président de la Métropole viennent de cadenasser le portail (©JMA / Métropolitain)

Le maire de Montpellier et le président de la Métropole émet un souhait : « Je voudrais qu’on utilise à l’avenir notre modèle en France ». Les modulaires Algeco vont être démontés et stockés à compter de vendredi 3 mai 2024 par une entreprise d’ici, prêts à être réutilisés pour un  nouveau village de transition. Mais pas sûr qu’il s’intègre dans le projet urbain de la Céreirède qui est prévu ces prochaines années sur cette zone champêtre de la Rauze, dont une partie se trouve dans un secteur inondable, il faudra donc trouver un autre site.

25/04/2024 à 11:42 par Jean-Marc Aubert