Hérault : à Florensac, l’agriculture met les gaz sur la méthanisation


5 M€ : le coût de l'installation d'un biométhaniseur pour l'exploitation agricole  de Florensac, pionnière de la métahanisation agricole.
5 M€ : le coût de l’installation d’un biométhaniseur pour l’exploitation agricole de Florensac, pionnière de la méthanisation agricole. (©dr)

La méthanisation agricole, qu’es aco ? C’est une technologie qui permet à des exploitations agricoles indépendantes de se lancer dans la production locale de gaz vert. C’est le choix opéré pour la première fois dans l’Hérault par Bérenger et Aurélien Carrier, agriculteurs à Florensac. Dans leur exploitation familiale, La Grimaude, ils produisent des céréales de consommation et du fourrage sur 450 hectares.

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Ils ont décidé de valoriser leur production en investissant 5M€ (dont deux aides de 650 000 € de la Région Occitanie et de l’Ademe) dans un projet d’avenir : la méthanisation agricole. Ils ont lancé le projet Biométhagri 34 en 2019, investissant dans l’achat d’un biométhaniseur inauguré le 17 juin 2022.

Plus de 2000 foyers alimentés

« Aujourd’hui, cette installation consomme 20 à 25 tonnes de matières premières par jour et produit du Biogaz à hauteur de 140 Nm3/H. Injecté dans le réseau GRDF, il alimente en gaz vert plus de 2000 foyers sur Florensac, Pinet, Pomerols, Marseillan, St Thibéry, Bessan, et même Béziers », expliquent les deux frères.

Outre le méthane, le système produit également un substrat riche en matière organique qui s’utilise comme du fumier. Cette matière viendra recouvrir les champs de la Grimaude : dans 4 ans, les agriculteurs feront le point pour voir si les sols se sont enrichis grâce à ce procédé. « Ce projet de méthanisation agricole consolide l’exploitation dans un contexte de changement climatique et d’incertitudes sur les revenus agricoles », analyse la Chambre d’Agriculture d’Occitanie.

Béranger Carrier se dit convaincu aujourd’hui de la pertinence de ce projet et souhaite même continuer à investir dans l’innovation agricole : étudier la liquéfaction du CO2, coproduit de la méthanisation, pour un autre usage comme la brasserie.
Béranger Carrier se dit convaincu aujourd’hui de la pertinence de ce projet et souhaite même continuer à investir dans l’innovation agricole : étudier la liquéfaction du CO2, coproduit de la méthanisation (©dr)

« Nous envisageons déjà une prochaine étape dans l’innovation : étudier la liquéfaction du CO2, coproduit de la méthanisation, pour un autre usage comme la brasserie »

Bérenger et Aurélien Carrier

L’instance consulaire explique que pour parvenir à produire du biogaz en quantité suffisante, les agriculteurs ont recours à la culture des CIVEs (pour cultures intermédiaires à valorisation énergétique). Plusieurs types de CIVEs existent : avoine, phacélie, ray-grass, pois fourrager, maïs, seigle, trèfle, moutarde, vesce… « Chaque CIVEs possède un fort potentiel méthanogène, mais elles permettent aussi d’enrichir les sols, d’en limiter l’érosion et d’augmenter le stockage du carbone dans la terre », précise la Chambre d’agriculture.

Sur leurs terres de Florensac et Saint Thibéry, les frères Carrier ont donc implanté plusieurs de ces cultures intercalaires entre leurs cultures principales : les CIVEs alimentent ainsi en matières premières le biométhaniseur qui en consomme 20 à 25 tonnes par jour. « Les CIVEs sécurisent l’apport du dispositif sans que nous ayons à remplacer nos cultures alimentaires par des cultures énergétiques dédiées », détaillent les deux exploitants : « De plus, la décomposition de ces cultures produit également un digestat qui enrichit nos sols, ce qui entraîne une réduction des charges en intrants de 50 %».

GRDF s’engage sur 15 ans

Même enthousiasme du côté de la Chambre régionale d’agriculture qui ne retient de cette opération pilote que du positif. « Ce projet a permis à Bérenger et Aurélien de passer d’une exploitation à énergie négative à une exploitation à énergie positive, et de revendre du gaz vert via un contrat d’achat de biogaz garanti sur 15 ans… L’exploitation sécurise ainsi 30% de ses revenus grâce au biométhaniseur ».

La Chambre régionale d'agriculture estime que ce projet répond à une attente sociétale et environnementale et qu'il suscitera des vocations...
La Chambre régionale d’agriculture estime que ce projet répond à une attente sociétale et environnementale et qu’il suscitera des vocations… (©dr)

De quoi élever le projet Biométhagri 34 en exemple régional : « Il s’agit aujourd’hui d’un site innovant et exemplaire au service de l’agriculture et de l’environnement qui permet de concilier transition énergétique et agroécologie », s’enthousiasme Pierre Colin, membre de la Chambre d’agriculture. Bérenger et Aurélien Carrier, qui ont fait visiter leur installation le 3 avril dans le cadre des journées portes-ouvertes Innov’action, confient également leur satisfaction « d’avoir choisi une solution écologique et économique s’inscrivant dans un véritable projet d’économie circulaire ».

Deux ans et déjà des résultats

Béranger Carrier se dit convaincu aujourd’hui de la pertinence de ce projet et se dit satisfait des résultats deux ans après le lancement. L’agriculteur souhaite même continuer à investir dans l’innovation agricole : « L’enjeu consiste à conserver l’autonomie de l’exploitation familiale… Nous envisageons déjà une prochaine étape dans l’innovation : étudier la liquéfaction du CO2, coproduit de la méthanisation, pour un autre usage comme la brasserie ».

A Florensac, un site inspirant pour l’Occitanie ?

« Ce site de méthanisation agricole dans l’Hérault est exemplaire à tous niveaux, notamment dans l’association des cultures intermédiaires pour améliorer le rendement de la méthanisation », commente Pierre Colin en soulignant que le projet Biométhagri 34 vient d’obtenir le label Bas Carbone grâce au stockage de carbone via les CIVEs.
« La Chambre est à l’écoute de tous les projets innovants pour les accompagner au mieux, notamment par la formation, par la mise en relation avec d’autres agriculteurs et sur l’aspect technique grâce à nos experts en climat et énergie ou encore l’IRD. Ce projet de Florensac répond à une attente sociétale et environnementale : nous espérons que cette initiative permettra d’essaimer l’envie auprès d’autres agriculteurs de faire de même ».

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20/04/2024 à 11:45 par Gil Martin