Hérault. Contrôles routiers : pourquoi les refus d’obtempérer sont plus graves qu’avant ?


Policiers nationaux et gendarmes sur un contrôle routier nocturne sur une route de l'Hérault
Policiers nationaux et gendarmes sur un contrôle routier nocturne dans l’Hérault (©Gendarmerie Hérault)

On ne compte plus les refus d’obtempérer sur des contrôles routiers des services de police et de gendarmerie, un phénomène qui est récurrent dans l’Hérault comme l’attestent les statistiques officielles du ministère de l’Intérieur, même si ces délits sont en baisse.

L’année dernière, 457 conducteurs ont pris la fuite, en se soustrayant volontairement aux signaux de policiers nationaux, municipaux ou de gendarmes, dans les villes, sur les routes et sur les autoroutes du département. C’est moins, puisqu’ils étaient 528 en 2022, avec ce constat : on retrouve les statistiques de 2016 -avec 458 délits à l’époque-, avant une constante augmentation : 526 en 2017, 528 en 2018, 519 en 2019, 591 en 2020, 575 en 2021, 528 en 2022 et 457 en 2023. 

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Ce sont donc 25 700 délits de refus d’obtempérer qui sont constatés en moyenne chaque année en France. La moyenne établie dans notre département sur dix ans, entre 2013 et 2023 est de 523 refus d’obtempérer par an, soit un taux de 4,45% pour 10 000 habitants dans l’Hérault. Outre la Haute-Garonne avec 514 faits en 2023, les chiffres de l’Hérault sont plus élevés que dans les autres départements de l’ex-Languedoc-Roussillon et d’Occitanie : 327 en moyenne par an dans le Gard, 258 dans les Pyrénées-Orientales, 158 dans l’Aude, 111 dans le Tarn. Avec des conducteurs sages, respectueux du code de la route et de l’autorité : 68 délits par an en Lozère et seulement 17 dans l’Aveyron !

Interpellations rapides

« Dans notre département, les chiffres sont en baisse, disons une légère baisse d’une année sur l’autre, mais les refus d’obtempérer qui mettent en danger nos agents et qui dégénèrent quelquefois avec de graves blessures, comme on l’a vu dans l’Hérault, sont encore beaucoup trop nombreux », relève un policier national héraultais. Avec cette réalité : « les refus d’obtempérer sont certes, moins nombreux, mais ils sont plus graves, avec des risques de mort ou d’infirmité ».

Malgré l'usage d'une herse par les gendarmes, le conducteur avai fui les forces de l'ordre durant plusieurs kilomètres, avant d'être retrouvé caché dans un buisson.
Une herse Stop Stick déployée par les forces de l’ordre pour intercepter un véhicule (©Gendarmerie)

Les forces de l’ordre redoublent de précautions en installant un point de contrôle avec toujours un policier ou un gendarme en retrait, muni d’une herse Stop Stick qui s’active dès qu’elle est jetée sur la chaussée pour crever les quatre pneus, tandis que si cette tentative d’immobilisation n’empêche pas le fuyard de s’enfuir, de semer les agents et de rouler sur les jantes, un véhicule est garé en renfort pour engager une course-poursuite.

« On a déjà vu des chauffards nous échapper à la faveur de zones plongées dans l’obscurité et d’être localisés à parfois 30 kilomètres », témoigne un motard de la gendarmerie.  

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Dans la majorité des cas, dans l’Hérault, les auteurs des refus d’obtempérer assortis de délits de fuite qui sont jeunes en général sont, soit rejoints et interceptés dans les minutes qui suivent, soit identifiés, localisés et interpellés dans les 24h, ou à la faveur d’investigations courtes. Avec ce constat quasi régulier : les chauffards ont pris d’énormes risques pour éviter de perdre des points sur leur permis de conduire.

Alcool, drogue et gaz hilarant

Les cas les plus fréquents dans l’Hérault, notamment ceux constatés le week-end et l’été, surtout la nuit et au petit matin sont liés à une absorption élevée d’alcool, à la consommation de stupéfiants, à l’inhalation de bonbonnes de gaz hilarant -protoxyde d’azote- et à des infractions comme le défaut d’assurance ou du contrôle technique, ou les deux cumulées. 

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La plupart des chauffards avouent en garde à vue avoir pris conscience qu’ils étaient en infraction et ont décidé de forcer un contrôle de police ou de gendarmerie à la dernière seconde, sur un coup de tête, regrettent ensuite d’avoir fait ce mauvais choix, notamment en sortant d’une cellule de dégrisement.

C’est la version qu’ils servent, penauds, lorsqu’ils sont déférés au parquet, puis jugés en comparution immédiate au tribunal correctionnel de Montpellier et de Béziers, où des récidivistes addicts à l’alcool notamment et interceptés alors qu’ils n’avaient plus de point sur leur permis ou qu’il était annulé, partent en détention.

Audiences « pastis »

Dans le passé, face au nombre de prévenus qui explosait, des chefs de juridiction et des procureurs de la République, comme ce fut le cas à Montpellier à une époque, regroupaient tous les dossiers lors d’audiences « pastis » du lundi ! Elles procuraient l’ivresse des procès, tant on était interloqué par des taux records affichés au volant.

La carte de France des refus d'obtempérer en 2023
La carte de France des refus d’obtempérer en 2023 (©Ministère Intérieur )

Un délit routier

C’est quoi ? Le refus d’obtempérer est un délit routier se caractérisant par le fait qu’un conducteur choisisse de ne pas s’arrêter, après qu’il en ait reçu l’ordre de la part d’agents appartenant aux forces de police ou de gendarmerie.

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Quels éléments constituent ce délit ? Le délit de refus d’obtempérer devient clairement constitué dès lors qu’un usager refuse de s’arrêter, après qu’il en ait reçu l’ordre de la part d’agents de police ou de gendarmerie clairement reconnaissables, grâce à leurs insignes extérieurs apparents et à leur uniforme, notamment. Il faut que la sommation de s’arrêter émise par l’agent soit claire, et que l’absence d’arrêt soit intentionnelle, afin de montrer que le conducteur tenait absolument à échapper au contrôle de police.

Sanctions musclées 

Quelles sanctions ? Les usagers de la route responsables d’un refus d’obtempérer risquent une peine d’emprisonnement pouvant atteindre jusqu’à un an, une amende pouvant atteindre 7 500 €, une perte de 6 points sur leur permis de conduire. Des peines complémentaires peuvent également être prononcées : suspension pour une durée maximum de trois ans du permis de conduire (avec possibilité d’aménagement, pour que l’usager puisse continuer à conduire dans le cadre de sa profession) au pénal par un tribunal judiciaire -travail d’intérêt général, Tig, jours-amende, confiscation du véhicule incriminé- et administrativement par le préfet : annulation du permis de conduire, assortie d’une interdiction de repasser l’examen pendant trois ans et obligation de suivre un stage de sensibilisation à la sécurité routière.

Un arsenal musclé pour lutter contre ce fléau, redouté par les policiers et les gendarmes lorsqu’ils déploient des barrages nocturnes sur certaines zones, où des conducteurs déboulent à vive allure.

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Si le refus d’obtempérer entraîne une ou des mises en danger de la vie d’autrui -forces de l’ordre ou autres conducteurs-, la peine peut aller jusqu’à 5 ans de prison, assortie d’une amende pouvant atteindre jusqu’à 75 000 € et d’une suspension totale du permis de conduire, sans aménagements liés à l’activité professionnelle de l’usager condamné. 

Dans l’Hérault, policiers et gendarmes multiplient les contrôles routiers pour traquer les chauffards, avec l’objectif de faire baisser le nombre d’accidents et de tués encore trop élevés en 2023, une des priorités en 2024 pour le préfet.

17/04/2024 à 10:22 par Jean-Marc Aubert