Législatives / Michaël Delafosse : « Je suis le maire de Montpellier, une ville libre qui ne reçoit pas d’instruction de Paris ! »


Michaël Delafosse
Michaël Delafosse : « Je suis le maire de Montpellier, une ville libre qui ne reçoit pas d’instruction de Paris ! » (©CN / Métropolitain)

Si le congrès national du Parti Socialiste a validé jeudi sa participation à la Nouvelle Union Populaire Écologiste et Social, dans l’Hérault la fronde est actée depuis plusieurs semaines maintenant. À l’instar du maire de Montpellier qui rejette tout mariage avec La France Insoumise. À l’occasion du lancement de la campagne du binôme composé de la socialiste Fatima Bellaredj et de l’écologiste Jacqueline Markovic lancé sur la 2e circonscription, Michaël Delafosse n’a pas hésité à marquer sa rupture avec les instances nationales du Parti Socialiste. « On m’a dit que je devais soutenir ce qui avait été décidé à Paris. Je suis le maire de Montpellier, une ville libre qui ne reçoit pas d’instruction de Paris ! » a-t-il lancé.

« Le pack est là »

« Dans des temps où on dit que la gauche peut disparaître, elle est là, dans sa diversité ». À la tribune, Michaël Delafosse harangue les militants fidèles à cette ligne héraultaise en dissidence avec ses instances nationales. Dans la salle, aux côtés des figures socialistes entourant Fatima Bellaredj et Jacqueline Markovic, la suppléante assura une rare présence écologiste, quelques rares militants d’autres partis affichent leur soutien. De là à parler d’une grande union… plutôt une réunion de famille pour galvaniser les troupes. Se rassurer aussi.

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« Oui il y a du vent, oui il est contraire et certains l’épousent, mais le pack est là et il tient bon », appuie Michaël Delafosse. Dès mercredi, la présentation par Kléber Mesquida et Carole Delga des candidats sur trois circonscriptions du département scellait les déclarations hostiles à l’alliance constituée à Paris entre Insoumis, Écologistes, Communistes et Socialistes. Un accord conclu par les instances nationales qui laisse un gout amer aux socialistes héraultais. Sur les neuf circonscriptions, deux ont été attribuées aux écologistes et aux communistes et les sept autres à La France Insoumise. En Occitanie, le bilan est rachitique avec six circonscriptions sur 49 possibles.

Trois candidatures de gauche sur la 2e

Fatima Bellaredj et Jacqueline Markovic batailleront donc sur la 2e circonscription de l’Hérault. Si Muriel Ressiguier, en difficulté au sein de son parti, sera bien présente sous l’étiquette « Députée sortante de La France Insoumise », le NUPES soutiendra le binôme Nathalie Oziol / René Revol. Michaël Delafosse se fait alors avocat pour dénoncer : « Elle est une femme de conviction qui défend ses idées. Je ne partage pas certains points avec elle comme sur l’Europe mais elle n’a pas démérité en soi. Cependant, il a été décidé de soutenir une autre candidate de La France Insoumise. Et donc de donner à la 2e circonscription de la désunion ».

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Les électeurs auront donc trois candidatures à gauche sur une circonscription exclusivement montpelliéraine et la plus symbolique. C’est également un enjeu pour Michaël Delafosse. « Si vous voulez que Montpellier réussisse, il faut des gens engagés, sincères et constants. Quand le député et le maire font alliance, les dossiers avancent. J’ai besoin d’une députée qui me soutient et soutient l’action de la majorité de gauche à Montpellier » explique-t-il.

« Nous sommes viscéralement européens »

« Vous ne me ferez pas défendre quelque chose auquel je ne crois pas, jamais. Comme Carole, Kléber, Fatima, Jacqueline et vous tous ici », adresse Michaël Delafosse aux militants en argumentant : « On peut penser différemment mais il faut se respecter, c’est comme ça que marche le rassemblement. Par honnêteté, je veux pouvoir me regarder devant une glace. et ne pas aller sur des marchés pour entendre des Montpelliérains me dire que je soutiens une candidature qui sur l’Europe est aux antipodes de ce que je pense, qui sur la vaccination a cultivé les ambigüités quand il fallait protéger la population. Une candidature qui s’alimente du bruit et de la fureur, qui proclame que la République c’est lui. Il faut de la cohérence ».

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L'occasion de réunir et galvaniser les troupes pour la campagne.
L’occasion de réunir et galvaniser les troupes pour la campagne. (©CN / Métropolitain)

Une cohérence qui pousse aujourd’hui Michaël Delafosse à se mettre en marge de l’union de la gauche réalisée à Paris. Il défend d’autant plus avec vigueur ce positionnement : « J’ai entendu l’exigence de rassemblement, dans la clarté, la cohérence et la sincérité. Les fondements d’une démocratie c’est de savoir tenir sa parole, d’être constant dans ses convictions et c’est pour cela qu’avec Carole, Kléber et vous tous, nous ne nous soumettons pas aux accords d’appareils car nous sommes viscéralement européens, que nous pensons que la gauche en France ne peut pas le tourner le dos à ce projet historique qui a garanti la paix depuis 1945. Nous avons besoin de défendre cet idéal ».

La voix empreinte de colère, déraillant parfois, Michaël Delafosse hausse le ton : « On m’a dit que je devais soutenir ce qui avait été décidé à Paris. Je suis le maire de Montpellier, une ville libre qui ne reçoit pas d’instruction de Paris ! Je suis le maire de Montpellier et c’est avec les Montpelliéraines et les Montpelliérains que les décisions se prennent ». S’il y a les grandes thématiques comme l’Europe, l’histoire locale creuse aussi le désaccord avec La France Insoumise 

L’histoire locale

« On voudrait me faire une leçon de rassemblement de la gauche ? », adresse-t-il avant de rappeler l’entre-deux tour des Municipales. « J’ai essayé d’aller chercher le rassemblement au-delà, auprès de gens qui avaient déposé une liste au nom de La France Insoumise. J’ai échoué. Plutôt que de venir avec la gauche rassemblée, qu’a-t-elle fait ? Belle insoumission ! Elle a préféré s’allier avec un milliardaire qui n’avait jamais voté de sa vie pour essayer de faire battre la gauche rassemblée. Il faudrait que nous passions en pertes et profits ce type de comportement ? ». Certains épisodes ne sont pas près de s’effacer des mémoires.

Michaël Delafosse sur la scène de la Halle Tropisme.
Michaël Delafosse sur la scène de la Halle Tropisme. (©CN / Métropolitain)

D’autant que depuis, les rapports ne se sont pas atténués. Le maire de Montpellier en profite pour fustiger l’opposition menée au sein du conseil municipal et de métropole incarnée par Alenka Doulain, figure de proue du mouvement Nous Sommes, en plusieurs exemples. « Quand nous avons proposé la délibération pour mettre en oeuvre la gratuité des transports conformément à notre engagement avec comme objectif, que fin 2023 notre Métropole soit la plus grande métropole d’Europe à l’appliquer, qui s’est opposée ? La France Insoumise. J’ai cherché à comprendre pourquoi. C’était parce que les socialistes, les écologistes et les communistes portaient la mesure. À force d’avoir la haine de l’autre, on en vient à perdre toute boussole politique », juge-t-il.

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Ou encore sur la résorption du bidonville du Celleneuve. « Nous avons trouvé un terrain pour installer un village de transition. Pas assez en standing, mais c’est un toit qui permet l’accès à l’école… À ce moment-là s’est déchainée l’extrême droite qui a tenu des propos abjectes. Durant ce conseil de métropole où nous étions depuis huit heures en débat, c’était dur, qui s’est opposé à cette démarche ? Les représentantes de la France Insoumise. Comment voulez-vous que je puisse me regarder ou regarder les Montpelliérains dans les yeux, si nous faisons des alliances contre nature ».

« Il est là le rassemblement »

Tandis que dehors, le public du festival Tropisme patiente un verre à la main avant la projection d’un documentaire sur les champignons hallucinogènes, dans la salle les militants socialistes retrouvent des couleurs. Les paroles de maire de Montpellier trouvent un écho favorable dans cette poche de résistance à la NOPES. La bataille sur la 2e circonscription est lancée quitte à être mis au ban du Parti Socialiste. Olivier Faure a prévenu jeudi soir des risques d’exclusion des candidats dissidents et sans doute de leurs soutiens.

Le pack socialiste réuni autour du binôme Fatima Bellaredj et Jacqueline Markovic.
Le pack socialiste réuni autour du binôme Fatima Bellaredj et Jacqueline Markovic. (©CN / Métropolitain)

« Je suis viscéralement attaché au rassemblement de la gauche. Notre responsabilité, ma responsabilité est de donner à la gauche le visage du rassemblement » persiste Michaël Delafosse en pointant avec force : « Il est là avec Fatima Bellaredj, une candidate issue de la famille socialiste, et Jacqueline Markovic, une candidate issue de la grande famille politique de l’écologie qui soutient Yannick Jadot. Socialistes et écologistes qui forment un ticket, voilà le rassemblement que nos électeurs nous ont demandé. Nous avons entendu leur message. Il est là le rassemblement ».

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En précisant toutefois que le groupe local EELV Montpellier a confirmé son soutien à la NUPES, la position de la conseillère départementale Jacqueline Markovic dans ce binôme semble bancale vis à vis de son parti, qui a obtenu la 3e circonscription de l’Hérault. À EELV d’en décider. Et comme toujours désormais, aux électeurs de gauche, pour ceux qui sont encore motivés, d’indiquer, les 12 et 19 juin, la bonne adresse du rassemblement sur leur GPS politique…

Pour Nous Sommes : « Faire perdre l’union, le pari du Maire macroniste de Montpellier »

Comme à son habitude, le mouvement Nous Sommes n’a évidemment pas tardé à réagir dans un communiqué de presse.

« Entre le bloc libéral et le bloc populaire, qui a émergé lors de l’élection présidentielle et se matérialise aujourd’hui par le retour historique d’un véritable front populaire, le Maire de Montpellier a fait son choix : ce sera le bloc libéral. Nos élus René Revol et Alenka Doulain lui ont pourtant tendu la main pour l’aider à sortir de l’ambiguïté macroniste dans laquelle il baignait depuis son élection en 2020.

Au lieu de s’occuper de Montpellier et de se faire discret, après avoir été le porte-parole de la catastrophique campagne d’Anne Hidalgo, ce dernier présente une candidature boulet sur la deuxième circonscription de l’Hérault. Avec un seul objectif : faire échouer la dynamique de nouvelle union populaire, la seule en mesure d’envoyer à l’Assemblée Nationale une majorité pour gouverner et protéger les français des réformes du Président Macron.

Ce faisant, le Maire insulte les 40,73% de Montpelliérains et Montpelliéraines qui ont voté pour Jean-Luc Mélenchon, mais aussi tous les autres qui ont voté pour un candidat du bloc populaire. En effet, 85% des sympathisants du bloc populaire veulent cette alliance.

Aujourd’hui, du fait de cette clarification, la scène politique locale est durablement recomposée: le maire “fauxcialiste” a choisi son camp, celui du président Macron et de sa logique néo-libérale ».

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Le 06/05/2022 à 19:28, par Cédric Nithard.